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    L'impôt d'après la dépense doit être maintenu pour les raisons suivantes :

    - L'impôt d'après la dépense est un outil de promotion économique ayant pour objectif d'attirer des ressortissants étrangers fortunés en Suisse.

    -  La Suisse doit faire face à une concurrence farouche provenant essentiellement de la part de la Belgique, de la Grande-Bretagne et du Luxembourg. Ces pays, tous membres de l'Union européenne, connaissent des systèmes fiscaux tout aussi intéressants, voire plus,  pour les personnes fortunées.

    - Si la Suisse ne connaissait pas cette forme d'imposition, il est illusoire de croire que les ressortissants étrangers fortunés viendraient se domicilier en Suisse. Les critères telles la sécurité ou la qualité de vie qu'offre la Suisse sont des facteurs qui entrent en considération uniquement pour choisir entre les Etats offrant des statuts fiscaux intéressants.

    -  Les personnes imposées à forfait font partie de la fourchette de contribuables qui paient le plus d'impôt en Suisse. Elles rapportent trois types de revenus fiscaux :

    a. Le montant annuel des impôts directs (fédéral, cantonal et communal) qu'elles paient en Suisse à titre d'impôt d'après la dépense s'élève environ à 300 millions de francs.

    b. Les héritiers des forfaitaires qui décèdent dans notre pays y paient l'impôt sur les successions sur la totalité de la fortune du défunt, ce qui représente des montants très élevés. A  titre d'exemple, le décès d'un riche industriel anglais à Montreux en 2001 a engendré le paiement d'un impôt de 108 millions de francs que se sont partagés la Commune et l'Etat de Vaud.

    c. Les forfaitaires paient la TVA sur leurs dépenses.

    - La présence des forfaitaires en Suisse engendre les retombées économiques indirectes suivantes :

    a.  les personnes qui paient l'impôt d'après la dépense sont fortunées, et sous réserve de quelques exceptions, ont un train de vie important. Si l'on part de l'hypothèse que le taux d'imposition d'un forfaitaire est de l'ordre de 35% (il s'agit d'un taux moyen vu qu'il varie selon les cantons)  et que le  montant total payé à titre d'impôt d'après la dépense est de 300 millions de francs, on arrive logiquement à la conclusion que le montant des dépenses annuelles des forfaitaires n'est pas inférieur à un milliard de francs. Ces dépenses concernent pour une grande partie l'industrie du luxe, de la restauration, de l'hôtellerie et de la construction.

    b.  Si les forfaitaires n'étaient pas domiciliés en Suisse, leur argent ne serait pas déposé dans les banques de notre pays;

  • c. Nombre d'entre eux soutiennent, notamment par le biais de fondations, la vie culturelle et artistique suisses.

    d. Lorsqu'une célébrité vient s'installer en Suisse,  la presse internationale fait indirectement la promotion de la ville ou de la station choisie comme lieu de résidence.

    - L'impôt d'après la dépense n'est pas inégalitaire par rapport aux Suisses fortunés. En effet, pour éviter que tel soit le cas, le législateur a imposé deux restrictions très contraignantes aux personnes bénéficiant de cette forme d'imposition : elles n'ont pas le droit de travailler en Suisse et elles ne doivent pas avoir résidé sur le territoire helvétique durant les dix dernières années. Notre pays est le seul à imposer de telles exigences. Elles n'existent ni en Belgique, ni en Grande-Bretagne, ni au Luxembourg. De plus, la question de l'égalité a un caractère purement théorique dans la mesure où elle repose sur l'idée que, si les forfaitaires étaient imposés au rôle ordinaire, ils paieraient plus d'impôts. Or, il est certain que si l'imposition à forfait était supprimée, les personnes fortunées étrangères ne viendraient plus en Suisse et une majorité de celles qui y résident déjà quitterait notre pays. Par conséquent, elles ne seront jamais soumise à l'impôt ordinaire dans notre pays.

    - Si la Suisse ne connaissait pas l'impôt à forfait, l'Etat n'encaisserait pas plus d'impôts, mais beaucoup moins. Ce manque à gagner devrait être compensé soit par une augmentation d'impôts pour les contribuables suisses, soit par une diminution des prestations étatiques.

    - L'impôt d'après la dépense est juridiquement et politiquement eurocompatible. L'Union européenne n'a aucune compétence en la matière. Preuve en est que nos concurrents sont membres de l'Union européenne et que la Cour de justice des Communautés européennes a jugé dans un arrêt du 11 mars 2004 que le système d'exit tax que la France avait mis au point  pour rendre plus difficile le départ de ses riches contribuables était contraire au droit européen.

    - Lorsque des citoyens fortunés quittent massivement un Etat, comme c’est les cas des Français, le problème n’est pas à chercher dans le pays où ils vont, mais dans celui qu’ils quittent.

    Philippe Kenel, docteur en droit, avocat à Pully et à Bruxelles, Secrétaire général de l'Association de Suisse romande des résidents étrangers imposé selon la dépense (ASREID)